Amnesty International et l’Ukraine

Florent Coury est le premier Français à s’être engagé dans la légion Zelensky. Son récit « Engagé volontaire » (Flammarion), est à paraître le 7 septembre. Disponible en pré-commande [Fnac]

La polémique provoquée par le communiqué de presse (et non le « rapport » comme l’écrivent les médias français) d’Amnesty International dénonçant la mise en danger des populations civiles par les forces armées ukrainiennes a été analysée en détail, je me concentrerai sur le substrat idéologique qui explique cette prise de position.

Sur l’analyse du communiqué à chaud, je recommande la publication de Jean-Marc Adolphe, pointant les nombreux problèmes soulevés par un communiqué qui contient un invraisemblable inventaire à charge, allant jusqu’à la mauvaise foi d’un paragraphe intitulé « des bases militaires dans des écoles » où l’on comprend, dès la première ligne, que ces écoles étaient évacuées, mais que les écoles sont en général situées en milieu urbain. Il fallait bien les indomptables enquêteurs d’Amnesty pour nous apprendre cela.

Sur la partie politique, rien de mieux que la publication d’André Marcowicz insistant sur la réaction du gouvernement ukrainien, lequel affirme que si des manquements venaient à être constatés (notamment l’utilisation d’hôpitaux en activité – ce qui semble très peu probable), des sanctions seraient prononcées : réaction qui suffit pour établir la différence de nature entre un pays libre, comme l’Ukraine, et l’agresseur russe qui n’a, lui, pas collaboré avec Amnesty International.

Mais c’est l’idéologie qui sous-tend cette charge qu’il m’importe de souligner

L’obscénité de dénoncer les résistants ukrainiens n’est pas une conséquence fâcheuse, elle est au contraire l’objectif même du communiqué : « Regardez comme je suis incorruptible ! Je critique les Ukrainiens en pleine invasion ! Je n’attends pas une enquête ukrainienne, ni une réponse constructive de leur part ! Je ne me compromets pas ! Critiquer un peuple violé, torturé, écrasé sous les bombes, voilà ce qui prouve ma pureté ! » Ce spectacle de l’intransigeance, c’est le petit monde des ONG bien-pensantes, donneuses de leçons, qui l’explique.

La rage de pureté, c’est d’expliquer que le camp du bien n’existe pas.

Tous bourreaux, tous victimes. L’égalité entre les premiers et les seconds, nourrie du relativisme permanent, permet la totale déstructuration de la pensée politique. Que ce soit l’élimination du terroriste iranien Qassem Soleimani ; Daech ou les bombardements de la coalition alliée en soutien des forces kurdes pour reprendre Raqqa à cette dernière, tout se vaut.

Le corolaire de cette idéologie, c’est l’aversion pour toute notion d’héroïsme et par conséquent de toute cause.

Si tout le monde est mauvais, alors nous n’avons plus d’injonction morale à soutenir qui que ce soit et notre propre lâcheté n’existe plus. S’il existait un camp de la lumière et un camp du mal, nous serions forcés d’agir, car nous aurions des comptes à rendre face à nos enfants et à l’Histoire. Le plus sûr raccourci utilisé par les bien-pensants pour démontrer leur propre pureté et justifier leur nihilisme moral est de délégitimer tout usage de la violence, de manière absolue : car, après tout, comment penser qu’une guerre ne puisse donner lieu à des abus, même du côté de ceux qui se défendent ? Que cette manière de penser amène à la conséquence logique qu’une victime de viol doive arrêter de se débattre, faute de devenir violente elle-même ne pose pas de problème à ces doloristes de la pureté auto-proclamée.

Amnesty International a oublié que le sens de l’engagement est toujours politique. Ce faisant, elle renforce la propagande de l’agresseur et de ses relais, comme l’illustre le tweet de Ségolène Royal.

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Liens – Amnesty International et l’Ukraine

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Le récit de Florent Coury, Engagé volontaire, Flammarion
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