Blackout sur Black Out

Dénonciation de la segregation aux USA

Le 5 juillet prochain un théâtre londonien organisera une « black out performance » c’est-à-dire qu’il réservera son entrée à un « public d’identification entièrement noire », afin de créer un espace « libéré du regard blanc ». Ce n’est pas une première, en 2019, une salle de Broadway avait été ainsi fermée aux blancs et aux asiatiques sous prétexte qu’il était « important que les spectateurs noirs puissent faire l’expérience de s’asseoir dans un espace théâtral où l’ensemble du public leur ressemble », et d’autres exemples ont suivi.

WHAT IS A BLACK OUT?

“A BLACK OUT night is the purposeful creation of an environment in which an all-Black-identifying audience can experience and discuss an event in the performing arts, film, and cultural spaces – free from the white gaze.” 

Et certains refusent de parler de racisme

Comme un réflexe, on martèle que « racisme anti-blancs » fait partie du vocabulaire de l’extrême-droite et que nous ne devons donc pas y toucher. Le sujet est ainsi clos. Les polémiques augmenteront et feront, nous le savons bien, grossir les rangs des deux extrêmes – celui qui hurle et celui qui refuse de nommer – ce qui ne sera pas pour leur déplaire. 

D’autres justifient le refus de l’emploi du mot « racisme » en choisissant une qualification à ce mot. Parle-t-on de racisme idéologique construit sur l’idée de race supérieure et inférieure, de racisme systémique qui découle d’un ensemble de discours, d’actions ou de règles institutionnelles… ? Une façon de noyer le poisson.

Idéologique ? On se rappellera des propos de Elijah Muhammad, président de l’organisation Nation of Islam. Il affirmait que tous les Blancs s’apparenteraient à des « démons ». Plus récemment, en 2016, dans son livre « Les Blancs, les Juifs et nous », titre hautement signifiant, Houria Bouteldja, porte-parole du Parti des Indigènes de la République écrit : « Je vous le concède volontiers, vous n’avez pas choisi d’être blancs. Vous n’êtes pas vraiment coupables. Juste responsables ».* Dans un autre registre, en 2018 sortait la chanson “Pendez les Blancs” du rappeur Nick Conrad.

Systémique ? Nous pouvions en effet réfuter ce racisme jusqu’à ces interdictions d’accès à des salles de spectacle qui sont annoncées publiquement et non réprimées par les autorités. Elles s’inscrivent dans ce qu’on appelle la ségrégation raciale, bien connue sous l’apartheid.

Quand l’intersectionnalité s’en mêle…

Arrive alors l’argument le plus pernicieux qui est de l’ordre de la justification causale. Le racisme contre les noirs est construit sur l’idée de supériorité d’une race sur l’autre, certains disent même d’une minorité qui subit une majorité, ce qui est faux dans les colonies. Le racisme contre les blancs est une réaction au premier. Derrière se joue le rapport entre « dominants » et « dominés ». Seuls les dominés peuvent être victimes. Nous entrons dans les schémas de l’intersectionnalité qui font que par définition même le blanc ne peut être victime. Comment nommera-t-on le récent lynchage d’une femme à Chicago par un groupe d’adolescents noirs pour la seule raison qu’elle était blanche ? Il y a d’autres cas…

La division de l’humanité en races « supérieures » et « inférieures », « civilisées » et « barbares » (comme le racisme colonial, le racisme entre les portoricains et les afro-américains aux USA, entre les arabes et les noirs au Mali), les préjugés sur la couleur de peau, le statut inférieur des descendants d’esclaves, des dhimmis… toutes ces formes de racismes ont les conséquences communes d’hostilité voire de haine pouvant aller jusqu’à l’oppression et la violence physique.

Les actes de racisme contre les blancs sont un racisme parmi les racismes. Il n’y a aucune concurrence entre les racismes, l’oublier serait ne plus savoir lutter contre l’assignation et les préjugés, oublier les fondements de l’anti-racisme : l’idée de l’universalité de l’Homme et de l’égalité dans la dignité.

Alors que toutes les législations des pays occidentaux permettraient sans l’ombre d’une difficulté de qualifier de racisme l’interdiction de l’accès à une salle à des spectateurs en fonction de leur couleur de peau, il nous faut nous demander ce que les autorités – britanniques en l’occurrence – attendent pour faire respecter le droit.

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