Le processus de paix n’est pas mort avec Rabin

Il est désormais un cliché largement répandu : l’assassinat de Yitzhak Rabin, le 4 novembre 1995, il y a exactement 29 ans aujourd’hui, aurait mis fin à toute chance de paix au Proche-Orient. Cette version des faits, véhiculée non seulement par des analystes mais aussi par des personnalités politiques de premier plan, trouve en l’assassin de Rabin, Yigal Amir, un coupable commode pour expliquer l’échec du processus de paix. Mais réduire le conflit israélo-palestinien à ce seul événement tragique est une simplification outrancière qui occulte l’histoire complexe des négociations et des initiatives de paix qui ont suivi.

Le rejet d’Arafat à Camp David : un tournant décisif

Il convient tout d’abord de rappeler que l’assassinat de Rabin n’a pas mis fin aux efforts de paix. En 2000, sous la présidence de Bill Clinton, le Premier ministre israélien Ehud Barak et le président de l’Autorité palestinienne Yasser Arafat se sont rencontrés à Camp David pour tenter de conclure un accord de paix. Clinton a révélé dans son livre, puis plus clairement encore lors d’un discours récent, que c’était Arafat qui avait rejeté l’offre israélienne, malgré les concessions importantes faites par Barak. Ce rejet a de facto mis un terme à ces négociations et, selon Clinton, coupé l’élan de paix.

Si l’accord de Camp David a échoué, ce n’est pas parce qu’Israël ou ses dirigeants n’étaient pas prêts à des concessions importantes, mais parce qu’un rejet fondamental est venu de l’autre côté

Le plan Olmert de 2008 : des efforts persistants pour la paix

Au-delà de Camp David, d’autres initiatives ont été entreprises. En 2008, malgré la deuxième intifada qui avait suivi ce rejet par Arafat des accords de Camp David, et qui, rappelons-le au passage, n’était pas “une petite bataille de rue homme à homme en jetant des pierres” comme on a pu l’entendre jusque dans l’émission Réplique ce week end, mais bien une suite interminable d’attentats aveugles sur le sol israélien ayant fait des dizaines de morts, en 2008 donc le Premier ministre israélien Ehud Olmert a présenté un plan de paix détaillé aux Palestiniens, offrant des concessions territoriales importantes. Pourtant, une fois de plus, ce fut du côté palestinien que l’opposition s’est manifestée : Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, n’a pas donné suite à la proposition.

Le mythe de l’assassin juif : une simplification réductrice

Pourquoi alors persiste-t-il ce mythe selon lequel l’assassinat de Rabin aurait été la fin du processus de paix ? Une explication tient à la tentation de simplifier un conflit extrêmement complexe. Il est plus facile, et plus conforme à certaines idées reçues, de désigner un seul responsable, surtout lorsque celui-ci correspond à un certain archétype. Yigal Amir, un extrémiste juif, devient ainsi l’incarnation de l’obstacle à la paix. Quel pain béni – si l’on peut dire – pour rendre encore une fois “les Juifs” responsables de la situation !

2 commentaires sur “Le processus de paix n’est pas mort avec Rabin

  1. En complément, l’échec de Camp David a été suivi des négociations de Taba en janvier 2001 entre Yasser Abed Raddo côté palestinien et Yossi Beilin côté israélien. Un accord territorial sur les contours des deux États y a été trouvé à 99,9%. L’échec final de Taba a deux causes, le refus palestinien d’accepter un partage de souveraineté sur l’esplanade à Jérusalem, le refus israélien d’accepter un droit au retour intégral des réfugiés palestiniens de 1948 et de leurs descendants (5 millions) à l’intérieur d’Israël dans ses limites de 1967.

    1. Sauf que cette revendication du droit au retour a été opportunément ressortie du placard par Arafat après de longues années sans l’évoquer, afin d’avoir un prétexte pour rejeter l’accord.
      C’est une des conséquences de ce fameux statut héréditaire unique des réfugiés palestiniens, ils sont maintenant tellement nombreux que ce retour hypothétique est devenu inévitablement synonyme de la fin d’Israël.

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