1. En le noyant dans d’autres luttes
Il n’y a plus, sauf venant de collectifs particuliers, de lutte contre l’antisémitisme qui ne soit associée à celle contre le racisme. Cela va des institutions aux slogans dans des rassemblements.
Encore ce jeudi 20 juin, lors du rassemblement contre l’antisémitisme (après le viol d’une enfant en raison de sa judéité), nous trouvons des banderoles contre le racisme et l’antisémitisme. L’association SOS Racisme y prend part avec ses mains « touche pas à ma pote », référence à une lutte contre le racisme, le mot antisémitisme n’apparaît même pas. Rien n’est relayé sur son site internet.
Remarquons que dans l’autre sens, SOS Racisme n’est jamais devenu SOS Racisme et antisémitisme.
Une autre lutte s’invite depuis quelques années, elle mériterait qu’on s’y attarde bien plus, celle de « l’islamophobie », directement créé par les Frères Musulmans et salafistes. Dans le programme du Nouveau Front Populaire, on lit « Lutter contre toutes les formes de racisme, contre l’antisémitisme et l’islamophobie ».
2. En confiant sa lutte à des antisémites
Les exemples sont nombreux à Bruxelles, mais nous en avons un bel à l’Assemblée nationale avec la nomination d’Ersilia Soudais comme vice-présidente du groupe d’étude sur l’antisémitisme. Elle se consacre à la dénonciation du régime d’apartheid d’Israël, au soutien à BDS (je ne reviens pas sur le fait que tout cela est une manifestation de l’antisémitisme de gauche)… et tout dernièrement elle en arrive à juger islamophobe l’étude faite par l’Ifop sur l’antisemétisme. La raison donnée est que « l’un des pans les plus importants et les plus caractéristiques du racisme en France a été passé sous silence : l’antistiganisme » [Video], qui est donc une annulation du sujet du rapport.
3. En en dénonçant systématiquement l’instrumentalisation
C’est le leitmotiv de LFI qui se place ainsi comme première victime de l’actualité (antisémite). Le mot est alors détourné de son sens, il est présenté comme un moyen de discréditer LFI. J-L Mélenchon l’a encore dit au sujet du viol de cette jeune enfant juive, ainsi que Mathilde Panot [Vidéo].
4. En le redéfinissant
En se targuant d’étymologie, on regarde sa racine « sémite » c’est-à-dire lié aux peuples de langues sémitiques comme l’hébreu et l’arabe. De là, face à la dénonciation d’un antisémitisme arabe, une contradiction est relevée : comment un arabe peut-il être antisémite puisque lui-même sémite. Le mot est « logiquement » écarté comme un non-sens. On rappellera alors que ce terme a été inventé au XIXè siècle par un journaliste allemand, Wilhem Marr, pour parler d’hostilité aux Juifs et d’aucun autre peuple.
5. En lui accolant des adjectifs
On souhaite, comme pour la laïcité, préciser cet antisémistisme. Cela donne dernièrement
• Mélenchon qui le qualifie de « résiduel » sur son blog. C’est donc quelque chose sans valeur, négligeable ; on ne pourra pas croire à l’interprétation de Bompard qui reprend la définition scientifique du mot résidu, et qui contredirait la suite des propos de J-L Mélenchon « [L’antisémistisme] est totalement absent des rassemblements populaires » . Le parallèle avec le « détail de l’Histoire » de Jean-Marie Le Pen a été fait.
• « Il n’y a pas d’antisémitisme structurel » pour Sandrine Rousseau, qui la veille déplorait l’antisémitisme qu’elle rencontrait au sein de LFI. Ainsi elle sous-entend que LFI sans JL Mélenchon (et d’autres) ne serait pas antisémite. En ajoutant cet épithète, elle déplace le sujet vers l’organisation d’un parti, dont elle réfute l’antisémitisme en tant que structure et se tait sur l’antisémitisme des personnes.
• Dans le journal Le Monde est paru dernièrement un article d’Arié Alimi (avocat dont le choix des causes en fait un défenseur de l’islamo-gauchisme) et Vincent Lemire (historien). Ils distinguent « l’antisémitisme contextuel, populiste et électoraliste » de « l’antisémitisme fondateur, historique, ontologique » laissant lire que l’un serait moins grave que l’autre. Ces adjectifs édulcorent le sujet.
Au passage il attribue au NFP le premier (contextuel, populiste, électoraliste…), celui que nous pourrions donner à l’antisémitisme allemand des années 30… mais le niveau de connaissance historique de LFI&Co est tel que cela ne les a pas choqués.
À l’évidence, cette volonté de préciser le nom a pour seul objectif d’en affaiblir la puissance.
Ces points participent à la dilution du mot. Il y a quelques jours JL Mélenchon est arrivé à une alchimie gagnante…
6. En en changeant la nature grammaticale
Il a en effet parlé de « racisme antisémite », comme si l’antisémitisme n’était qu’une des formes du racisme. Or l’antisémitisme a une antériorité et une mutation que n’a pas le racisme, il a aussi cette spécificité de reposer sur des croyances et stéréotypes comme le déicide, la ruse…. sur un fantasme, celui d’une puissance occulte aspirant à gouverner le monde, indépendant même de la présence de Juifs, ce que ne comporte aucunement l’idée de racisme.
Mais qu’importe, le but est bientôt atteint. Quand l’adjectif est épithète, il peut être supprimé sans nuire au sens de la phrase. L’idée d’antisémitisme pensé comme adjectif épithète du mot racisme pourra bientôt être rayé.
Merci à Olivier Ranson pour l’illustration !