Législatives 2024 : que faire ?

Aujourd’hui, nous allons sortir de notre fonction d’information pour se rapprocher de l’action et essayer de réfléchir à l’attitude républicaine à adopter lors de ces élections législatives.

Pour ce faire, nous essaierons d’apporter de la rationalité, afin que chacun puisse faire son choix de manière éclairée et pas seulement sur des impressions ou des préférences personnelles. Comme vous le verrez, nous pensons qu’en réfléchissant À L’AVANCE, et surtout en évitant les décisions ou consignes de vote à l’emporte pièce au soir du premier tour, nous avons moyen, collectivement, de nous tirer de ce mauvais pas.

Nous nous adressons ici aux électeurs attachés à la République, et donc laïques (la laïcité figure dans le préambule de notre Constitution et n’est donc pas, contrairement à ce que vient de déclarer notre Président, sujette à débat)

Si vous n’avez toujours pas compris que LFI est un parti antisémite ou à tout le moins qui fait monter l’antisémitisme (ce n’est l’avis que de 92% des français juifs après tout), ou si vous doutez du fond idéologique raciste et xénophobe du Rassemblement National, ne perdez pas votre temps à lire ce qui suit.

Tout d’abord, sur la place de l’antisémitisme dans cette campagne. Nous écrivions dès le 1/2/2023 dans un post scriptum sur Le Naufrage antisémite d’EELV, la chose suivante : 

La Cheuille de Fou n’a pas pour vocation de se spécialiser dans la dénonciation de l’antisémitisme. C’est malheureusement l’explosion d’un antisémitisme débridé dans toutes les strates de la société qui nous oblige à y consacrer tant d’articles.

Nous y sommes désormais. C’est avec tristesse et consternation que nous constatons que cette question est devenue absolument centrale dans le débat public du pays. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir prévenu.

Un choix non-binaire

Malgré un traitement médiatique et politique constant, la première chose à rappeler – elle est pourtant évidente –, c’est que nous ne sommes pas condamnés à un choix binaire entre le Nouveau Front Populaire et le Rassemblement National. Dans chaque circonscription il y a des candidats républicains, qu’ils soient investis par Ensemble, Horizon, le Modem ou même LR (attention, dans le cas des LR il y a les candidats restés fidèles à la ligne républicaine et ceux ayant franchi le Rubicon de l’alliance avec le RN).

À ce qu’on sache, aucun bulletin n’est encore tombé dans aucune urne d’aucun bureau de vote. Il n’y a donc à l’heure où nous écrivons aucune, AUCUNE ! circonscription dans laquelle on soit condamné à avoir un député issu des extrêmes.

La question du choix entre le NFP et le RN ne se posera donc qu’au deuxième tour dans certaines circonscriptions. Fort heureusement, un grand nombre d’entre nous devrait échapper à cette alternative, néanmoins, certains qui se retrouveraient dans une triangulaire pourraient en oublier l’évidence, c’est pourquoi nous la répétons : vous avez la possibilité d’élire un député républicain.

Les enjeux

À force de voir arriver des thématiques “moisies” dans le débat public, on en oublierait presque de les classer, de les hiérarchiser rationnellement.

Listons les principales catastrophes que nous pouvons prévoir et attribuons-les à un des camps. Non pas, bien sûr que l’autre soit exempté, mais il nous faut réfléchir sur la base du pire scénario possible pour chacun de ces thèmes. 

Nous détaillons sous le tableau les raisons qui nous conduisent à la classification.

Thèmepire avec NFPpire avec RN
AntisémitismeX
Racisme / XénophobieX
Catastrophe économiqueX
Risque de renversement des institutionsX
Soutien à Poutine contre l’UkraineXX
IslamismeX
Absence d’oppositionX

Antisémitisme : bien que nous ne soyons pas dupes du fond idéologique du RN, la pyromanie de LFI, mais aussi d’EELV et du PCF sur ce sujet, notamment mais pas uniquement, en important le conflit israélo-palestinien fait courir un risque majeur aux français de confession ou d’origine juive. Ils en ont bien conscience (à 92% ils placent LFI comme parti faisant le plus monter l’antisémitisme). Il existe un risque réel et tangible d’un départ massif des citoyens juifs en cas de gouvernement NFP. Ce risque est clairement moindre dans le cas d’un gouvernement RN.

Racisme / Xénophobie : on le voit déjà à l’approche de l’élection, la seule perspective d’une victoire du RN « libère » une parole et des actes racistes. À l’heure où nous écrivons, Marine Le Pen vient de déclarer qu’elle ne voyait pas ce qu’il y avait de raciste dans l’expression « à la niche » lancée par deux de ses militants à une voisine noire (séquence diffusée dans l’émission Envoyé Spécial). Comme Mélenchon et ses adeptes ne voient jamais d’antisémitisme mais uniquement une instrumentalisation de l’antisémitisme (il l’a également redit ce soir), Marine Le Pen ne voit pas de racisme. Les conséquences du racisme et de la xénophobie seront terribles non seulement pour les personnes, mais aussi pour l’économie, en particulier dans les secteurs où on a déjà du mal à trouver de la main d’œuvre (restauration, bâtiment…)

Catastrophe économique : la bataille est rude entre le NFP et le RN. Dans les deux cas nous aurions des incompétents complets aux commandes du pays, mais il semble que le RN soit plus conscient de sa propre incompétence et retire de son programme toutes les mesures économiques. Surtout, nous pensons qu’à tort ou à raison, les partenaires et créanciers de la France pourraient garder espoir que cela ne se passe pas plus mal qu’avec d’autres gouvernements illibéraux tels que la Hongrie, la Pologne du PiS (jusqu’à récemment) ou l’Italie de Meloni. Du moins, la catastrophe complète pourrait peut-être être différée de quelques mois, alors que nous ne voyons aucun signe qui permettrait de penser que le NFP  lèverait le pied dans son accélération quotidienne vers le désastre.

Risque de renversement des institutions : c’est peut-être le point le plus important. Quand on prend le risque d’entrer en dictature, il faut se demander quand et comment on pourra en sortir. Nous n’avons aucune illusion sur l’acceptation de la démocratie par un des extrêmes, mais le fait que le RN soit très fort parmi les forces de l’ordre et l’armée fait peser un risque très sérieux.

Soutien à Poutine : il est difficile dans ce cas de départager, les deux camps étant affiliés à Poutine. Ceux qui espèrent que Glucksmann ou quelques socialistes raisonnables pourraient avoir une influence sur LFI en seront pour leurs frais (n’apprendront-ils jamais ?). Si les extrêmes passent, la France rejoindra le camp de Poutine.

Islamisme : C’est un sujet crucial dans la société française. Le RN ne propose aucune solution (la majorité présidentielle, d’une grande mollesse sur ce sujet, n’a pas suffisamment montré son efficacité). En revanche il est clair que le NFP est un marche-pied des Frères Musulmans. Sommes-nous si près du point de non-retour qu’il faille en faire un point décisif ? C’est une possibilité. Voyez où en est la région de Bruxelles, finalement assez peu d’années après avoir laissé entrer le loup dans la bergerie. La république française est mieux armée pour ce genre de défis, mais qu’en sera-t-il après le passage des pro-Hamas au pouvoir ?

Absence d’opposition : la gauche conserve une qualité : elle sait s’opposer. On ne doute pas qu’elle s’opposerait dans la rue à la politique du RN, et à plus forte raison à un renversement des institutions. C’est même toute la stratégie de Mélenchon que de faire élire le RN pour se présenter ensuite comme la seule alternative possible, si possible par la force. Or l’inverse n’est pas vrai. Ce ne sont pas quelques dégénérés du GUD qui s’opposeraient à une dictature chaviste. Quant au centre, on le voit assez actuellement : le silence des pantoufles règne. Il vaut donc mieux, de ce point de vue, garder la gauche dans l’opposition.

On le voit, les périls sont nombreux, et plus intenses avec le RN ou LFI rebaptisée NFP selon les sujets. Ceci pourrait conduire certains à avoir une « préférence » pour l’un ou pour l’autre , en considérant que certains sujets sont plus rédhibitoires que d’autres.

Et donc, que faire ?

Or justement, il nous faut passer au-dessus de nos conclusions individuelles, et agir collectivement, en tant que Nation.

Nous, les républicains de ce pays, devons réfléchir et nous coordonner pour éviter le basculement du pays dans la dictature.

La première chose que nous devons faire, c’est nous abstenir d’avoir un avis définitif et tranché. Il faudrait, si c’était possible ne surtout pas se précipiter et donner de consignes de vote dès le soir du premier tour, et prendre le temps d’analyser la situation circonscription par circonscription.

Si, comme c’est possible – mais encore une fois pas certain ! – la majorité présidentielle et les autres partis républicains n’étaient pas en mesure d’obtenir une majorité à l’Assemblée, l’enjeu pourrait être de faire en sorte qu’aucun des extrêmes n’obtienne la majorité absolue. (289 sièges). Car en majorité relative, il reste possible de faire échec à la politique du gouvernement.

Il est donc tout à fait possible que, au soir du premier tour, nous constations – par exemple – que le RN est en position d’obtenir une majorité absolue alors que le NFP en est très loin. Nous aurions alors intérêt à équilibrer en votant NFP. L’inverse est également possible. Plus compliqué : une majorité centriste est impossible mais aucun des deux camps extrêmes ne se dégage franchement après les projections du premier tour. Il faudrait alors panacher : faire élire le RN ici, le NFP là… afin qu’aucun des deux ne prenne trop le dessus et n’obtienne de forte majorité.

Oui ! cela semble technique, utopique, et nécessiter une coordination citoyenne complexe.

Alors écoutez-moi, chers concitoyens. Si vraiment au soir du premier tour nous nous retrouvons en situation de choisir entre le RN et LFI, c’est que nous entrons vraiment dans le dur et que nous ne sommes qu’au début des coordinations citoyennes complexes. Cela s’appelle la Résistance, et cela demande un sursaut, du courage et du travail.

N’ayons pas peur. Nous aurons d’autant moins peur que nous aurons réfléchi et que nous aurons un plan.

D’ici là, n’oubliez pas : on n’en est pas encore là. Vous avez le choix, dans toutes les circonscriptions.

À vos bulletins pour pouvoir encore s’exclamer ensemble : « Vive la France ! »

7 commentaires sur “Législatives 2024 : que faire ?

  1. Il me semble que dans le cas où il faudrait voter NFP, il faudrait envisager deux cas. Soit le candidat vient de LFI Verts ou NPA, soit il vient du PS. Dans le premier cas il conviendrait de l’éliminer, dans le second il pourrait être acceptable (à voir individuellement), l’essentiel étant que LFI soit majoritaire au sein des élus de NFP.

    1. Ce raisonnement me semble être une prolongation de l’utopie qui consiste à croire que les élus PS auraient une quelconque indépendance.
      C’est la musique qu’ils jouaient avant l’élection de 2022 en nous assurant que l’accord n’était qu’électoral et que le PS reprendrait son indépendance après l’élection. Or il n’en a rien été. Le PS a presque systématiquement voté comme LFI à l’assemblée.
      On vient de constater pour la énième fois, avec la « trahison Glucksmann », qu’il ne s’agissait en rien d’un accident. (Je mets trahison entre guillemets parce qu’à un moment, à force de répéter les mêmes erreurs, je pense que les électeurs socialistes se trahissent tout seuls).
      Ceci dit, il n’est pas totalement exclus qu’au soir du premier tour, devant l’alternative, certains candidats PS renient publiquement leur investiture NFP et rejoignent le centre. Raison de plus pour ne pas se précipiter.

  2. Sans être d’accord avec toutes vos analyses, je le reste sur L’ESSENTIEL :
    ce que vous écrivez dans le premier paragraphe sous votre titre « Un choix non binaire ».
    Pour des raisons « médiatiques » dangereuses, il semble que le débat public veuille l’oublier.

  3. J’eus péféré, et de loin, lire une analyse? des ressentis? sur l’évolution de notre société (et de ceux qui la composent ) sur le viol de cette enfant juive de 12 ans; TELLEMENT PLUS IMPORTANT que l’ego et la soif de pouvoir de nos hommes et femmes politiques qui nous manipulent jour après jour!
    La violence chez nos enfants est un réel sujet de société ,au même titre que l’islamiste qui gangrène notre société en est un autre…

  4. Je vous adresse le commentaire que je viens de publier sur le groupe des adhérents du Printemps Républicain, faisant suite à la publication de votre excellent article :
    Merci pour cet article – à conserver ! – qui a l’immense mérite de mettre à plat l’ensemble de (ou des) la problématique(s) à laquelle (auxquelles) nous sommes confrontés !
    Pour ce qui est du choix au 1er tour, la situation me semble assez claire. Dans ma circonscription (la 1ère des Alpes de Haute-Provence), je voterai (ainsi que mon épouse) pour la candidature LR (parce que je connais l’engagement sur le plan social du suppléant et l’attachement aux principes républicains du binôme), contre le député RN sortant et contre le candidat écologiste (une provocation sur ce territoire !) parachuté par les états-majors parisiens de la NFP ; est-il utile de préciser que je vote à gauche (communiste le plus souvent – encore une fois aux Européennes… promis, c’était la dernière !) depuis 50 ans ? Si une candidate socialiste, légitime celle-là, avait pu se présenter, j’aurais vraisemblablement voté pour elle. Au second tour, dans le cas d’une triangulaire que je pense probable, je maintiendrai mon choix du 1er tour ou me reporterai sur le candidat « Ensemble » (maire d’une ville importante du département), à contrecœur mais sans hésitation.
    La suite des événements me semble plus difficile à envisager. Une victoire du RN, plus ou moins manifeste, me parait fortement probable ; l’accession au pouvoir de l’extrême droite va nous conduire à nous opposer aux mesures xénophobes, racistes, antipopulaires qui seront prises. L’affrontement risque d’être encore plus « musclés ». Comment allons nous nous organiser pour résister ? C’est la question qui est abordée dans le dernier paragraphe de l’article et qui me semble aujourd’hui essentielle. A ce jour, à ma connaissance, à l’exception de quelques figures de notre camp (toujours les mêmes), je n’ai pas senti de soutien politique organisé de la part de laïques, républicains, humanistes… Par ailleurs, attaché à ma famille politique d’origine qui est celle de la gauche – mais d’autres participent du même combat -, se pose pour moi une autre question, celle de la sanction qu’il faudra adresser à tous ceux – c’est à dire la quasi totalité des membres de la gauche – qui ont trahit les valeurs du socialisme.
    C’est sur ces points que je focalise désormais mon attention, en attente de tous les avis, idées, proposition d’initiatives, etc…
    Encore merci à la Cheuille de Fou…

    1. Merci pour votre commentaire.
      Oui, on ne sent effectivement pas un grand empressement pour organiser la résistance… Pas même une manif ! On est loin de 2002 où la menace réelle était pourtant inexistante. D’un autre côté il faut reconnaître que voir les premières victimes du futur régime d’extrême-droite faire tout pour que ce régime advienne est assez décourageant.
      Quant au vote, il semble plus urgent de préserver son ego (« jamais je ne pourrais voter pour [choisissez le parti que vous voulez] ») que la République. Beaucoup mourront de honte, mais les mains propres. À titre personnel je préfère mourir les mains salies par l’encre d’un bulletin mais en pouvant me regarder dans une glace.
      Bon courage. Nous entrons dans le dur.

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