Parlez-vous Juif ?

Ecole Supérieure de Journalisme

Un événement sans grande importance, mais à la fois drôle et désolant, s’est produit sur BFM ce jour.

Les faits : 

Alors qu’une interview est réalisée en duplex lors d’une soirée consacrée à l’attaque du Hamas contre Israël, personne ne traduit les propos d’un homme israélien. On entend alors une voix dans la régie engueuler on ne sait qui :

« Elle est interprète français/anglais, elle n’est pas interprète juive ! Putain ! Mais vous êtes des bouffons ! »

La Dépêche, comme beaucoup d’autres médias, relate alors cet épisode et s’attarde sur le ton inconvenant et l’insulte “Vous êtes des bouffons !”. C’est vrai que ça n’est pas une ambiance très “cool”, mais bon, on a vu pire dans une rédaction TV. Le fait remarquable est surtout que ce soit passé à l’antenne.

Plus tard, les journalistes en plateau présentent les excuses de la chaîne et, sans citer les propos entendus :

« Nous présentons nos excuses à tous ceux qui ont été choqués. […] n’autorise en aucun cas des propos qui portent atteinte à l’honneur ou à la considération de toute personne »

À nouveau, le problème semble bien être le mot “bouffons”.

Personne ne semble donc s’étonner ou s’excuser du terme “interprète juive”.

Mais qu’est-ce qu’un interprète juif ? Jean Ferrat est un auteur compositeur interprète juif, Leonard Cohen, Barbara Streisand sont des interprètes juifs… mais les chances de BFM de les accueillir en plateau sont assez limitées.

Non, la personne en question voulait apparemment signifier “hébreu” ! Elle avait simplement besoin d’un interprète hébreu/français !

Le fait que l’hébreu soit, avec l’arabe, une des deux langues officielles d’Israël, un des États les plus souvent abordés par l’actualité internationale, ne semble pas être connu de la rédaction de BFM !

Ce qui est grave ici, ça n’est pas tant l’emploi du mot juif, c’est le niveau d’ignorance de membres de la rédaction d’une chaîne info.

Comment imaginer que ces gens puissent comprendre les subtilités d’une région ultra-complexe comme le Proche-Orient si une distinction aussi élémentaire leur est étrangère ?

Comment pourraient-ils restituer fidèlement une information faite de concepts extrêmement fins strictement nécessaires à la compréhension de cette région ?

Si l’on était pédagogue et donc patient, on pourrait leur proposer un interprète français/sanskrit de confession juive afin que la rédaction comprenne que ce n’est pas d’un juif dont elle a besoin mais d’une personne qui maîtrise deux langues : le français et l’hébreu.

En tout cas, on sait maintenant qu’à la rédaction de BFM et dans beaucoup de médias ayant relayé l’info, il y a non seulement une sale ambiance, mais aussi plus d’un bouffon !

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