Dominique Rousseau est un brillant Professeur de droit constitutionnel.
Pourtant ces derniers temps, il semble que son patronyme le rapproche plus de Sandrine que de Jean-Jacques, pourtant auteur d’un intéressant projet de Constitution pour la Corse.
À l’heure où les débats demandent à être éclairés, c’est assez logiquement que France Inter, dans son émission Le Téléphone Sonne, l’invite régulièrement pour expliquer les enjeux des décisions, le rôle du Conseil Constitutionnel, et désormais pour commenter ses décisions.
Vendredi 14 avril, il était bien sûr sur le plateau du Téléphone Sonne pour commenter les très attendues décisions du Conseil sur la réforme des retraites et sur le projet de referendum.
Bien évidemment déçu par la décision -lui qui n’avait eu de cesse de parier haut et fort sur une invalidation beaucoup plus importante- il dit :
Je suis surpris par la validation de la voix procédurale par laquelle la réforme a été adoptée. Le Conseil d’ailleurs, quand on lit sa décision, reconnaît que le principe de sincérité et de clarté des débats a été quand même malmené.
Dominique Rousseau
Source : France Inter, Le téléphone Sonne (à 3:20)
Désinformation
Ce que dit la décision Conseil Constitutionnel, que M. Rousseau prétend donc « lire »
Un autre aspect du débat concernant la procédure d’adoption de la loi avait trait à la clarté et à la sincérité des débats parlementaires. En particulier, la question était soulevée par les parlementaires requérants de savoir si l’application cumulative de plusieurs procédures prévues par la Constitution et par les règlements des assemblées avait entaché d’irrégularité ou non la procédure suivie.
L’examen successif de chacune de ces procédures a conduit le Conseil constitutionnel à relever que, appliquées conformément aux règlements des assemblées, aucune n’avait porté d’atteinte substantielle aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire.
Décision du Conseil Constitutionnel du 14/4/20203
Source : Décision du Conseil Constitutionnel
C’est de la pure désinformation. M. Rousseau dit « lire » la décision, or il dit exactement l’inverse de ce qui y est écrit. Au lieu d’éclairer le débat du haut de sa compétence, il se sert de celle-ci pour l’obscurcir. C’est quasiment de l’usurpation de qualité (au sens figuré, bien entendu). Non pas que M. Rousseau n’ait pas les qualités qu’il prétend avoir, mais il se sert de celles-ci à l’inverse de ce que l’on est, en tant que citoyen désireux de s’informer, en droit d’en attendre.
Notre foudre est tombée, pas de chance, sur M. Rousseau, qui de plus publie une tribune ce jour dans Le Monde, qui relève plus du journalisme d’opinion que du commentaire juridique, mais passons.
Mais au-delà du cas de Dominique Rousseau, le rapport qu’entretiennent les faiseurs d’opinion (journalistes, experts…) et leur responsabilité sociale conférée par leur expertise semble se dissoudre à grande vitesse. Ceci est hautement inquiétant car si l’on pouvait encore lutter contre le complotisme en pointant les différences de méthodologies, de validation, de déontologie entre de vrais médias et des charlatans de réseaux sociaux, cette distinction devient de plus en plus ténue.
Les « libertés » prises par ces intervenants avec la réalité rappellent très fortement l’émergence de Fox News et l’ère qui a précédé l’élection de Donald Trump, dont les États-Unis ne se remettent toujours pas.